Les Misérables de Ladj Ly
Tragédie des trajectoires
Synopsis :
Stéphane, tout juste arrivé de Cherbourg, intègre la Brigade Anti-Criminalité de Montfermeil, dans le 93. Il va faire la rencontre de ses nouveaux coéquipiers, Chris et Gwada, deux « Bacqueux » d’expérience. Il découvre rapidement les tensions entre les différents groupes du quartier. Alors qu’ils se trouvent débordés lors d’une interpellation, un drone filme leurs moindres faits et gestes…

MON AVIS :
2006, Ladj Ly sort un documentaire retraçant ces événements et les suivant. 365 à Clichy Montfermeil, produit par Kourtrajme, signe donc le début, à la réalisation, du jeune homme.
2019, l’auteur réalise une version longue de son court-métrage, Les Misérables. Durant la période séparant ces deux projets, d’autres documentaires ont vu le jour sous son objectif.
En fonctionnant ainsi, nous obtenons une vue d’ensemble sur les problématiques inhérentes aux quartiers délaissés par l’État, exception faite des représentants de la Loi. Nous retrouvons donc une jeunesse livrée à elle-même, des rapports de force constant entre population et policiers ou encore les interactions entre différentes communautés. Chaque moment permet d’approfondir la personnalité de chacun, de mieux comprendre leurs convictions, leurs motivations, mais surtout d’observer leur évolution respective.
En s’affranchissent de ce lourd fardeau, l’auteur réussi à créer des personnages attachants, car imparfait, et offrir à son œuvre une identité unique, car personnelle, mais surtout proche de la réalité.
Par ailleurs, là où il est courant de filmer les banlieues de manière très terre–à–terre, le réalisateur opte lui pour des plans aériens. En dehors de son utilité topographique, cette approche permet de mettre à profit la verticalité de son environnement. Les tours ne se résument plus à des halls de bâtiments négligés. L’ensemble de leurs composants est donc mis à profit.
Il y aurait encore beaucoup de choses à dire sur cette œuvre autant sur la performance des acteurs, le background des protagonistes ou sur l’importance d’un tel film dans le paysage cinématographique français. L’obtention du prix du jury, ex-aequo avec Bacurau, lors de la 72eme édition du festival de Cannes, est une juste récompense au vu du chemin parcouru par Ladj Ly et des difficultés inhérentes à une telle entreprise. On ne peut que souhaiter que Les Misérables trouvent le succès qu’il mérite auprès du public et que son message sera entendu.